Jean-Claude
Polack
“Introduire
la politique
plus vivement”
Chantier. De mai 68 à...
Passer à « l’ennemi »
Quand entrez-vous dans le militantisme ?
Au cours de mes études. Mais mon engagement politique est
complètement pris dans mon histoire familiale. Ma mère et
mon père étaient des juifs polonais. Ils étaient nés tous les deux
à Lodz. Ils s’y sont connus très jeunes et ils ont fait partie des
jeunesses communistes, ce qui en Pologne, à cette époque-là,
était osé et assez dangereux. C’est d’ailleurs l’une des raisons
pour lesquelles ils ont quitté très tôt la Pologne. Mon père a été
étudiant en médecine à Strasbourg et il est devenu français. Ma
mère est venue quelque temps après ; elle n’étudiait pas, elle
était presque trop jeune pour cela. Elle est arrivée avec sa
meilleure amie, Bianca Zazzo, la femme du psychologue pour
enfants René Zazzo. Elle a été très tôt militante, faisant partie
de groupes qui soutenaient les républicains espagnols, etc.
Mon père est mort quand j’avais trois ans; on a alors quitté la
France, ma mère et moi, à cause de tous les dangers qui la
menaçaient en tant que Polonaise juive et communiste. Elle a
décidé de partir et on a suivi cette filière, assez connue
d’ailleurs, qui passait par Marseille puis par la frontière avec
l’Espagne, Barcelone, etc. Filière qu’a empruntée Walter
Benjamin, avant de se suicider quand il apprend qu’il ne pour-
ra finalement pas trouver asile en Espagne.
J’ai donc vécu très tôt dans un climat d’engagement politique.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, nous nous sommes, ma
mère et moi, réfugiés en Amérique latine ; d’abord en Jamaïque
et puis à Cuba, précisément. À notre retour, en 46, ma mère me
met sans hésitation chez les Vaillants, les petits scouts commu-
nistes de l’époque ; staliniens, quoi. J’étais très content de faire
ça. Et puis ma mère a assez vite changé d’opinion au contact de
ses amis, de Sartre aussi. Ensuite j’ai été aux jeunesses commu-
nistes révolutionnaires – ça ne s’appelait pas comme ça à
l’époque mais je ne me souviens plus du nom. Je ne suis rentré
au Parti que beaucoup plus tard, après la guerre d’Algérie. Le
début de mes études coïncide d’ailleurs avec elle ; je commence
médecine en 54 et je termine en 62, ce sont exactement les huit
années de guerre. Là, je suis rentré à fond dans l’opposition,
pour l’indépendance algérienne et la décolonisation entière et
sans ambiguïtés.
À ce moment-là, j’étais plutôt dans tous les mouvements, dis-
ons, parallèles au PC, qui n’étaient pas anti-communistes, mais
pas communistes non plus, qui n’acceptaient pas d’entrer dans
le PC tel qu’il était. On a eu toutes sortes de tentations d’aller
dans des formations trotskistes, etc. Mais, pendant toute la
durée de la guerre, l’activité politique se concentre en réalité
dans l’Unef, qui à l’époque est un vrai mouvement politique, un
vrai syndicat, assez puissant et très actif. Je pense que les étu-
diants n’avaient pas envie d’aller à la guerre, donc ils se sont
foutus à fond là-dedans. L’association des étudiants en...
http://www.la-parole-errante.org/fichiers/Expo68/chantierpolack.pdf
Né en 1936, Jean-Claude Polack est psychiatre et psychanalyste. Il a travaillé à
la clinique de La Borde, de 1964 à 1976. Avec François Pain et Danièle Sivadon,
il a coréalisé François Tosquelles, une politique de la folie" (Edition La Sept-Arte
- 1989), un film témoignant de l'engagement de ce célèbre psychiatre catalan,
inspirateur de la psychothérapie institutionnelle. Jean-Claude Polack est aujourd'hui
directeur de la revue Chimères, fondée en 1987 par Gilles Deleuze et Félix Guattari.
Né en 1936, Jean-Claude Polack est psychiatre et psychanalyste. Il a travaillé à
la clinique de La Borde, de 1964 à 1976. Avec François Pain et Danièle Sivadon,
il a coréalisé François Tosquelles, une politique de la folie" (Edition La Sept-Arte
- 1989), un film témoignant de l'engagement de ce célèbre psychiatre catalan,
inspirateur de la psychothérapie institutionnelle. Jean-Claude Polack est aujourd'hui
directeur de la revue Chimères, fondée en 1987 par Gilles Deleuze et Félix Guattari.
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